Quelle campagne médiatique pour Ultra, l’ultime album de Booba ?

Personnalité incontournable du rap français, qu’on l’aime ou qu’on le déteste, partout où il passe, Booba ne laisse jamais indifférent.

A l’image de son dernier album, Ultra sorti le 5 mars 2021, annoncé comme celui qui clôt 26 ans de carrière. 10 albums : De Temps Mort à Ouest Side, en passant par Lunatic, B2oBa a laissé derrière lui des classiques qui ont marqués plusieurs générations. Plus qu’un simple rappeur, celui qui se fait appelé le Duc de Boulogne a géré sa carrière comme un entrepreneur. Une communauté de ratpis pour l’entourer, ses propres médias, ses labels, une marque de vêtement et de boisson… il a su armer son arc de plusieurs flèches pour naviguer comme un pirate dans les eaux houleuses du rap français.

En se démarquant par la culture des clashs, il a soufflé le chaud et le froid pendant plusieurs décennies. Tantôt avec ses ennemis… mais également à en perdre des alliés ! Ultra, à son image se qualifiant lui-même d’aller dans les extrêmes, est lancé dans un contexte bien particulier.

• Un lancement plus médiatique que social média

Pour le roi de la communication… A vouloir faire la guerre, on y laisse parfois des plumes. Dans l’engrenage des clashs, celui qui avait une page Instagram à 5 millions de followers a vu sa principale plateforme de communication désactivée par le réseau social lui-même. Un handicap que le Duc de Boulogne a su retourner en sa faveur. Effectivement, pour le lancement de Ultra, il a misé sur une campagne médiatique offensive, qui lui a visiblement donné de très bons résultats.

Jamais on a vu Booba aussi présent sur les différents plateaux médiatiques usant des différents formats à sa disposition pour se livrer davantage auprès de son public : médias digitaux, télévisions, antennes radios… Capable de se positionner sur des questions sociétales, de clasher grâce à un esprit fin dont lui seul à le secret, ou d’apporter sa vision sur les nouveautés artistiques de la scène urbaine, Booba ne manque pas d’arguments et arrive à se défaire de l’image parfois rude qu’il véhiculait sur ses réseaux.

Celui qui a créé ses propres plateformes de diffusion pour contrer les médias mainstream, avec lesquels il a pu avoir parfois des rapports compliqués, se prête aujourd’hui au jeu des médias. Les journalistes ont finit par adopter son style parfois hardcore et n’hésitent pas à encenser la carrière du rappeur.

• Passage par les médias digitaux

Parmi les médias digitaux, Brut nous a mis l’eau à la bouche. La diffusion en trois parties de cet interview a permis de faire un bon teasing sur la plateforme Instagram qui capitalise presque 2 millions d’abonnés. Diffusés le 3, 5 et 9 mars, ces échanges ont pu accompagner la sortie de l’album. Un bon relai pour contrebalancer avec la perte de l’audimat sur cette plateforme.

Konbini, lui, s’est plutôt prêté à proposer un exercice inédit d’une rencontre surprise avec Julien Beats pour un jeu de question/réponse. Créer la sympathie en s’alliant au jeune youtubeur, opération séduction réussie pour ce père de famille qui n’hésite pas à faire part de sa bienveillance au jeune garçon, fan de B2o, et à échanger sur les dynamiques actuelles de la musique urbaine.

• Passage par les plateaux TV

De passage sur Touche pas à Mon poste, avec Cyril Hanouna, il ne passe pas inaperçu non plus. Il arrive à faire parler de lui en provoquant une scène hilarante, lorsque Jean Messiha commence à s’insurger contre les codes du rap français, qu’il maîtrise finalement peu. L’occasion pour B2o, l’artiste aux positions bien tranchées de se positionner ouvertement anti-FN, et à faire quitter du plateau la personnalité politique. En s’exprimant tout au long de sa carrière sur des questions relatives à l’esclavage et au racisme, il enfonce le clou en fermant le dialogue de son interlocuteur.

Sur la chaîne publique France 5, on l’a également vu défendre son oeuvre pour C Ce soir jouant le jeu des journalistes TV pendant plus d’une heure. En détaillant les secrets de son style d’écriture et de ses métaphores qui ont marquées plusieurs générations, l’artiste avoue « se prendre la tête pendant deux semaines pour une virgule ». Longtemps mis en avant pour ses talents d’écriture, les journalistes n’hésitent plus à le présenter en tant que poète des temps modernes et à le comparer aux plus grandes personnalités littéraires.

• Intervention sur les radios

Pour RFI France 24, cap sur les ondes radios. Légendes Urbaines proposait également une chronique inédite faisant l’éloge des punchlines incontournables qui ont marquées la carrière de l’artiste franco-sénégalais, pour introduire Ultra. Un format suffisamment libre pour ouvrir les discussions sur des thématiques actuelles.

L’une des seules plateformes sociales médias qu’il possède reste Twitter, l’oiseau bleu avec lequel il n’est visiblement pas le plus à l’aise. Un terrain sur lequel il avait tenté de provoqué un Planet Rap, sur la radio Skyrock qu’il a boycotté depuis ses tout début de carrière, en clashant Laurent Bouneau. Des négociations houleuses qui n’ont pas concrétisé l’affaire.

• Des chiffres astronomiques

Le résultat est sans appel, les ratpis ont fait le taff. Les chiffres de la sortie de cet album sont astronomiques. Même s’il ne s’agit pas du meilleur démarrage de sa carrière en terme de vente comme nous le souligne Booska-P, chaque plateforme de streaming a ses propres records avec cette tracklist. Meilleur démarrage de l’année mondial annoncé par Spotify, classement dans les top mondiaux… Mona Lisa, en featuring avec JSX, se démarque comme le single efficace de cet album. 100 millions de streaming déclarées à travers le monde pour Ultra, les chiffres ne cessent d’impressionner.

Il est venu, il a vu, il a vaincu. @booba pète les scores avec #ULTRA. Ton son préféré après 10 jours d'écoute ? 👇 pic.twitter.com/M2vjUOqyoC

— Deezer France (@DeezerFR) March 16, 2021

Toutes ces opérations médiatiques nous ont prouvé qu’il était possible de passer par d’autres relais. Sa page Instagram était son principal réseau de communication, mais il a su s’ouvrir aux autres formats pour faire la promotion de Ultra.

S’il clôt son oeuvre en clamant : « Prenez-moi si vous voulez, refermez derrière-moi, laissez-moi chanter la liberté, l’illégalité une dernière fois » au sommet de son art, les projets sont toujours d’actualité pour la suite. Des featuring annoncés et d’éventuels singles prévus pour celui qui ne manque jamais d’inspiration, ce compétiteur ne veut pas perdre son trône en continuant son rôle de producteur et en s’initiant à la réalisation de séries. Quatre saisons sont déjà en préparation, nous on a hâte de les découvrir.

Et vous, qu’avez-vous pensé de cette stratégie médiatique ? Ultra, meilleur album de sa carrière ? Dites-nous tout.